La plus lointaine limite, l'île d'Ogerland

Roi de l'Echiquier Nombre de messages : 19 Date d'inscription : 20/06/2008

Apophis réapparut quelques instants plus tard, dans un paysage inquiétant. C'était une côte battue par les vents, une falaise contre laquelle venaient mourir avec une violence abominable des vagues gigantesques qui se réincarnaient en une épaisse écume blanche. En dépit des vents rapides, une brume persistante et particulièrement épaisse flottait partout, glaçant le corps et engourdissant les membres. Un coup d'oeil vers l'eau révéla à Apophis une forme gigantesque qui se mouvait lentement à une certaine distance de là. Un monstre marin, et pas le genre de minus que l'on trouvait dans la Mer du Crâne ou la Mer des Illusions. Ici c'était l'Océan de Brume, et les règles du jeu n'étaient pas les même.

L'île d'Ogerland se situait dans l'Océan de Brume, à vrai dire c'était l'extrême limite accessible pour les habitants de Mär Heaven dans cet océan, et pourtant parvenir jusqu'ici était déjà un exploit. Apophis réajusta son manteau et, bravant le vent, se dirigea vers l'intérieur des terres. Après une demi-heure de marche difficile, il arriva en vue de lumières dans la brume. Des maisons, en réalité l'unique village de l'île. Il y en avait treize, exactement, disposées en cercle et entourée de barrières en bois coupées par deux ouvertures diamétralement opposées. Des crânes d'animaux qui n'existaient plus en Heaven depuis bien longtemps étaient fichés sur des poteaux. Apophis sourit et franchit la barrière.

Un grand feu brûlait au centre de la grande place formée par les maisons. Deux femmes d'une quarantaine d'années se tenaient près de ce feu, et tournèrent la tête au même moment lorsqu'elles aperçurent Apophis. Ce dernier s'arrêta et s'inclina légèrement.

« Je suis le Roi Apophis. Je désire m'entretenir avec la reine Pekala. Le temps est arrivé pour que le Clan de la Lune Bleue me remette ce qui me revient de droit. »

Nombre de messages : 99 Date d'inscription : 23/09/2007

Les deux sorcières interrompirent leurs discussions et regardèrent Apophis avant d'échanger un regard. Elles se détournèrent du feu pour faire face au Roi de l'Echiquier, et le fixèrent avec méfiance.

"Apophis ? Parvenir jusqu'ici est une chose, mais il faut nous prouver ce que vous avancer, et pour cela il nous faudra plus qu'une annonce."

"Cela ne vous pose pas de problème de passer une épreuve, j'imagine ? Si vous êtes réellement celui que vous prétendez être, vous devriez vous en sortir. Comprenez que nous ne pouvons laisser n'importe qui importuner notre Reine."

Le regard sans pitié les deux sorcières tendirent leurs mais l'une vers l'autre jusqu'à ce que leurs deux paumes se touchent, et commencèrent à murmurer une suite de sons incompréhensibles. Les flammes devinrent plus hautes et plus vives encore en quelques secondes, avant de se transformer en un brasier incontrôlable, d'où jaillit une créature énorme et irradiante de magie. Un monstre de flammes sans âme conçu pour répandre la destruction. La créature bondit hors du feu et vint se placer entre Apophis et les deux sorcières, creusant deux cratères aux points d'impact de ses pieds fourchus. L'aura de la créature était aussi impressionnante que sa taille, cela ne devait pas être une épreuve uniquement pour la forme, pour que de tels moyens soient déployés.

La plus lointaine limite, l'île d'Ogerland Imanangelbycryptlordnx6

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"C'est le moment de vérité."

"Montrez-nous donc ce que vous savez faire."

Roi de l'Echiquier Nombre de messages : 19 Date d'inscription : 20/06/2008

L'invocation était imposante, cela allait sans dire. Apophis écouta silencieusement les deux rombières déblatérer leurs inepties, et finalement faire apparaître cette créature issue du brasier qui crépitaient derrière elles. Apophis considéra un instant le monstre, avant de reporter son attention sur les sorcières.

« Vraiment ? C'est intéressant, ce test. Je vais pouvoir me dérouiller un peu, voilà qui me ravit au plus haut point. »

Il releva la tête vers le crâne cornu du monstre qui culminait à plusieurs mètres. Les yeux rouges démoniaques de la bête le fixaient comme deux phares à travers la brume. Apophis sourit. D'un geste presque théâtral, il leva lentement le bras droit, et enfin orienta sa main de telle sorte que sa paume faisait face à la créature. Brusquement, une dizaines d'immenses chaînes noires brisèrent l'espace et jaillirent autour de la créature pour l'entraver. Les chaînes se mirent à l'enserrer avec force, exerçant une pression incroyable sur elle sans même qu'elle ne puisse bouger. Apophis contempla le spectacle quelques instants, puis fit pivoter sa paume vers lui, avant d'achever le spectacle par un simple et sec claquement de doigts. Les chaînes se resserrèrent au maximum, faisant littéralement éclater le monstre gigantesque qui se désintégra en une nuée de flammèches qui retombèrent tout au tour, semblables à des feux follets perdus dans le brouillard. Les chaînes disparurent à leur tour en se fondant dans la brume. Apophis abaissa son bras et regarda à nouveau les deux femmes. Il était franchement déçu, sans pour autant s'être vraiment attendu à grand chose de mieux.

« C'est votre invocation la plus puissante ? Est-ce une plaisanterie ? Comment deux impotentes comme vous peuvent-elles s'imaginer pouvoir tester le Roi de l'Échiquier ? Si vous persistez à vouloir me faire perdre mon temps, votre espérance de vie risque rapidement de se chiffrer en secondes. Où est la reine Pekala ? »

Apophis en avait vu assez. Il n'était pas venu pour s'embarrasser de formalités stupides et voulait rencontrer Serafina Pekala dans les plus brefs délais. Si ces sorcières comptaient encore lui faire obstacle, il changerait rapidement de méthodes, puisqu'elles ne comprenaient pas quand on leur parlait poliment.

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Les deux sorcières eurent l'air effondré de la disparition subite de l'invocation. Elles ne s'étaient pas attendues à ce qu'un monstre pareil se fasse éliminer aussi simplement, surtout qu'elles s'y étaient mises à deux pour l'appeler. Apophis, décidément excellent orateur, choisit ce moment pour placer enfin sa première menace de la conversation. Dans un tel cas de figure, les deux femmes n'avaient guère plus le choix et se devaient de reconnaître leur interlocuteur comme ce qu'il était : le Roi de l'Echiquier.

"Euh ... Bien, vous pouvez rencontrer la Reine Pekala."

"Elle se trouve dans la maison du fond."

Une question brûlait les lèvres des sorcières. Elles savaient que ce jour finirait par arriver, mais étaient anxieuses quant à la suite des évènements. La réaction d'Apophis une fois qu'il aurait ce qu'il voulait était après tout imprévisible.

"Sans vouloir vous offenser, puis-je vous demander ce que vous ferez de ceci ?"

Roi de l'Echiquier Nombre de messages : 19 Date d'inscription : 20/06/2008

« Qu'est-ce qu'on peut faire avec cela d'après vous ? Je compte bien écraser tous mes adversaires, à commencer par cet enfoiré de Desty Nova. Il a outrepassé les limites la dernières fois, son impunité est terminée. Quant à vous mes charmantes sorcières, vous feriez mieux de rester hors de cette affaire. »

« Nous n'aurons peut-être pas le choix ... Si sa Majesté Mephistophélès et le Vitriol ... »

« Ils n'en feront rien. L'Armée Royale n'a jamais bougé le petit doigt, pas même quand les Ombres ont envahi ce monde. Que croyez-vous qu'ils puissent faire de façon concrète, ou ne serait-ce que légitime aujourd'hui ? »

« A cette époque ils ont tout de même envoyé les Anges Ext ... »

« Foutaises. Les Anges ne sont qu'une pièce parmi d'autres, et par ailleurs il n'est même pas prouvé qu'ils ont agi sur ordre de Mephistophélès. »

« Mais ... »

« Cela suffit. J'ai assez perdu mon temps. Rappelez-vous simplement de rester en dehors de cela, et tout ira bien pour vous, votre île ne m'intéresse pas. »

Après avoir lancé un ultime regard moqueur aux deux femmes, Apophis se détourna, contourna le bûcher et marcha droit jusqu'à la maison à l'extrémité du village. Elle était à peine plus haute que les autres, et à l'exception d'une rune sur la porte, elle ne portait aucun signe distinctif. Apophis y frappa deux fois, et sans attendre de réponse ouvrit la porte. La grande rencontre allait enfin avoir lieu ...

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La pièce était plutôt bien éclairée, la lumière du soleil filtrait à travers les fenêtres alors que ... le soleil ne brillait pas à l'extérieur. Assise sur une chaise haute, une sorcière qui donnait l'air d'avoir une dizaine d'années lisait avec flegme un énorme grimoire, tout en touillant un énorme chaudron avec une grande spatule maintenue par ses pieds. Elle leva brièvement les yeux quand Apophis entra, avant de les baisser à nouveau sur son grimoire.

Spoiler:

"Salut Apophis. Je t'offre quelque chose à boire ?"

Elle claqua des doigts de sa main libre, faisant sortir deux coupes d'un placard ainsi qu'une bouteille sans étiquette qui se déboucha, et déversa de son contenu dans les deux récipients. L'ambiance dans cette pièce avait quelque chose de très particulier, un peu hors du temps. Rien à voir avec le tumulte des éléments déchainés qui s'en donnait à coeur joie à l'extérieur.

"Je me demandais quand tu allais passer. Comment tu vas ? Je suppose que tu es venu chercher ce que tu voulais ? Je sais dans quel ordre de puissance se situent tes adversaires, mais le Clan de la Lune Bleue garde Alkhemia depuis des siècles et tu sais pourquoi. En dépit de tout ce qui se passe, penses-tu qu'il est vraiment judicieux qu'elle ressurgisse aujourd'hui ?"

Roi de l'Echiquier Nombre de messages : 19 Date d'inscription : 20/06/2008

Le sourire aux lèvres, Apophis prit la coupe qui arrivait vers lui en flottant par magie, en huma le contenu, avant de la porter à ses lèvres. De l'excellent hydromel, comme on n'en faisait plus depuis bien longtemps. Il n'y avait rien pour s'asseoir dans la pièce, mais cela ne le dérangeait pas outre mesure, il préférait rester à hauteur de son interlocutrice. Le Roi de l'Echiquier fut surpris que cette dernière ne tergiversa que peu, et passa rapidement à la raison de la venue d'Apophis jusqu'ici. Les choses s'annonçaient donc bien jusqu'à présent.

« Alkhemia est mon arme légitime, tu le sais. Si je l'avais eue la dernière fois, les choses se seraient passées autrement. J'ai commis l'erreur de vouloir faire sans, et cette Sorcière des Dimensions et le Baron Samedi ont réussi à m'enfermer. C'est navrant ... »

Apophis laissa échapper un léger soupir. Il avait perdu tellement de temps, tellement de décennies, de siècles, alors que sa prise de pouvoir aurait pu avoir lieu bien plus tôt.

« Et je ne parle même pas de la fois précédente. Enfin, ça remonte loin, si loin ... Quoiqu'il en soit, je compte bien avoir Alkhemia avec moi cette fois-ci. Je sais ce que j'affronte, et je ne pourrai pas me débarrasser des immortels autrement. A moins que tu ne puisses me dire quelque chose sur Ankh ? Certains sont toujours à sa recherche, et je crains qu'elle ne ressurgisse au plus mauvais moment. »

Depuis l'issue des batailles mythologiques et le piège de l'artisanne, il n'avait plus été question d'Ankh de façon publique. Cependant, le Roi de l'Echiquier était pratiquement certain que le Ghost Chess la cherchait encore, et lui-même comptait envoyer prochainement quelques hommes en mission. La Dague restait l'arme absolue, et même si la plupart des pistes menant à elles s'étaient effondrées, Ankh n'en était pas moins l'une des choses les plus redoutables en ce bas-monde.

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"Ankh ? Tu penses bien que si je le savais ... enfin. Bien, je vais te rendre ton épée puisque tu y tiens tant. Il te faudra bien ça si le Vitriol se reforme. Méfie-toi de ... ce n'est pas la peine de te le dire, suis-je bête !"

Tout en sirotant une gorgée d'hydromel, Serafina fit un geste désinvolte de la main. Un coffre derrière elle s'ouvrit en grinçant, révélant une épée d'un noir intense, profond. Les bords de la lame étaient eux d'un blanc froid, ce qui provoquait un étrange contraste et produisait un effet sinistre. D'un autre geste du poignet Serafina fit arriver l'arme jusqu'à Apophis. Il n'y avait pas de fourreau.

"Ne fais pas trop de bêtises avec ça. Bien, comme on est en aux petites faveurs je voudrais te demander quelque chose."

Serafina vida son verre d'un trait, et l'envoyer se poser sur une étagère derrière elle. Elle regarda Apophis droit dans les yeux, une expression sur le visage synonyme du plus grand sérieux. Son regard paraissait littéralement passer le Roi de l'Echiquier aux rayons X.

"Pourrais-tu garder un oeil sur notre fille ? Je crains qu'elle fasse des choix qu'elle pourrait bien regretter plus tard. Et je ne dis pas ça en l'air, j'ai eu ... des visions. Vois ce que tu peux faire, d'accord ?"

Roi de l'Echiquier Nombre de messages : 19 Date d'inscription : 20/06/2008

Avec un calme et une lenteur extrêmes, Apophis avança la main et se saisit de l'épée. Ça y était, il la tenait enfin. Alkhemia. Cela faisait si longtemps que cette arme mystique avait été séparée de lui, mais à son contact il sentit l'énergie affluer dans la lame. Il allait enfin pouvoir prendre sa revanche. Cette épée était l'une des Lames Lunaires qui avaient été forgées longtemps, très longtemps auparavant. Bien avant l'ère mythologique. Combien étaient parvenues jusqu'à l'époque présente ? Un nombre infime, probablement. Et Alkhemia était l'une des plus puissantes, dépassant même Rune Écarlate et Kyoka Suigetsu. Hermetica ne présentait strictement aucun intérêt à ses yeux, quant à Ankh, c'était probablement l'une des seules qui surpassait l'épée ténébreuse. Apophis continua de contempler l'arme un instant, avant de relever la tête vers Serafina.

« Nox a choisi d'elle-même de rejoindre l'Échiquier Fantôme. Je la raisonnerai au mieux, mais il y a des limites. Si elle se dresse contre moi, elle devra en assumer les conséquences. »

Quel genre de visions avait eu Serafina ? Elle ne le révélerait sans doute pas, mais le pire était à craindre. Au vu de ses parents, il ne faisait aucun doute que le potentiel de la jeune sorcière était colossal et ne s'était pas encore révélé sous son plein jour. Apophis prendrait cela en considération pour la suite des évènements. Il allait partir, mais quelque chose l'intriguait encore : il n'en avait que trop entendu parler depuis qu'il avait mis les pieds ici, c'est donc que ce n'était pas anodin.

« Bien ... je serais bien resté plus longtemps, mais j'ai encore un certain nombre de choses à régler. Avant cela, tu as parlé du Vitriol. Qu'est-ce que tu sais exactement sur l'avancement de la situation ? J'attends une réponse claire, tu sais ce qui risque de se produire si Mephistophélès et Dandelion décident de reprendre leur place. »

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"Je vois, tu es un homme occupé, comme toujours. Tu devrais prendre le temps de t'arrêter un peu."

Elle adressa un léger sourire à Apophis. Il allait certainement lui répondre qu'il attendait depuis presque six cent ans, elle le le connaissait assez pour le savoir. Serafina releva les yeux vers lui. Devait-elle lui répondre concernant Vitriol ? Le fait même de le faire ne changerait-il pas la nature de sa vision ? C'était un choix délicat. Elle soupira, et le regarda droit dans les yeux sans cesser de sourire.

"Grince, grince, tour du péché purifiée dans la première lumière qui transperce le monde. Vacille, vacille, tour de l’équilibre absolu. Qui va tomber, le ciel ou nous ?"

Il voulait une réponse claire, et bien il était servi. Cette ancienne comptine était suffisamment explicte pour qu'il comprenne de quoi il retournait, et s'il se méprenait ... eh bien tant pis. Serafina tourna la tête pour regarder par la fenêtre. L'agréable soleil printannier éclairer un monde paisible, superbe. Cet endroit était hors de tout, et c'était pour cela qu'elle l'aimait. Un monde à part, à l'écart de la tempête perpétuelle d'Ogerland, tout en étant en son coeur.

"A bientôt, j'espère. Sois prudent."